1570 et 1590 Les guerres de religion chez nous
aude Janin
La fraternité humaine que prônent les religions est présente dans l’histoire. … mais les dérives aux quelles conduisent les conflits religieux, y sont aussi présentes… ce constat qui est d’actualité fait référence dans ce propos au seizième siècle, théâtre de sanglantes guerres de religion entre catholiques et protestants… Plusieurs noms et dates jalonnent pour nous ces épisodes troublés : Le Concile de Trente de 1545 à 1563 qui précise et édicte plusieurs principes de la religion catholique, Luther, Calvin.... qui s’en détachent et sont initiateurs de la religion protestante, engageant .le choc avec le catholicisme. Le Traité d'Augsbourg en 1555 qui consacre la partition de l’Allemagne entre catholicisme et protestantisme, .. Les guerres commencent… La nuit de la St Barthélémy, qui déclenchée à l’époque de Marie de Médicis vit le massacre de nombreux protestants, en est un des faits marquants… vus de l’échelle nationale et parisienne.
Notre région n’en fut pas à l’écart. De nombreux villages seront victimes des bandes de factions diverses. Thizy, dont le Seigneur Zacharie de Rébé avait pris parti pour les protestants, est au cœur des luttes… si l’on peut parler de cœur pour de tels évènements.
Mais revenons aux faits…. Nos campagnes vont subir tour à tour, les invasions, attaques et occupations des 2 camps adverses. Deux périodes vont profondément marquer nos villages.
Tout d’abord en 1570. Le Maréchal et Amiral de Coligny, qui a longtemps été au service du Roi, a pris fait et cause pour le protestantisme et participe à ce titre aux guerres de religions. Après les deux défaites qu’il subit à Jarnac et Moncontour, c’est en remontant du midi qu’il passe dans notre région. Un de ses lieutenants, Briquemaut, et son équipe, Clermont d'Amboise, Guytéri, Brosse, Mossonière, Tremblay, assiègent et prennent Thisy.
Sur les registres paroissiaux, Monsieur le Curé Gravillon, relate les évènements : « L'an mil cinq cent septente a esté brulée la ville de Thisy par Briquemor et Clermont d'Amboize, ennemi de dieu et de ses commandements et de notre mère la saincte esglize, et ce fust le lendemain du jour du Corps de Dieu (la fête-Dieu) 1570. XXVII° jour de may. » .
Lay et Saint-Symphorien sont ensuite investies. La bande de coreligionnaires sous les ordres de Briquemaut pille et saccage l'église. Les soldats s’y installent. Ils commettent les mêmes excès dans les autres chapelles de la paroisse : Saint-Clair de Lay, et la chapelle Sainte-Marthe, au cimetière du dit Saint-Symphorien .
M. Antoine Rivière, prêtre curé de Fourneaux, raconte à son tour en ces termes le passage des protestants au château de l'Aubépin et à Lay.
« Il y a environ deux ans, pendant que l'amiral de Coligny conduisait les troupes de huguenots et reîtres qui traversèrent ce pays de Beaujolais, lesdits huguenots ou une grande partie de leur armée vinrent courir jusqu'à l'Aubépin et autres châteaux des environs et entrèrent plus de cent audit lieu de l'Aubépin ; d'autres allèrent à Peysselet, l'Espinasse emmenèrent le bétail et les vivres qu'ils trouvèrent tant dans lesdits châteaux que dans les villages des environs, mirent le feu à plusieurs églises. Pendant qu'ils pillaient ledit château de l'Aubépin, ledit déposant était caché dans les bois et garennes dudit lieu, distants d'un ou deux jets d'arbalète, et entendit bien rompre quelques portes, coffres et meubles dans ledit château. …/…».
A relever encore dans la même enquête les dépositions de deux autres témoins, dont l'un déclare « que les huguenots qui avaient occupé Lay et pillé le château de l'Aubépin étaient au nombre de six vingt chevaux, commandés par Patonville, l'un des capitaines de Briquemaut » ; l'autre déclare que « saisi au château de l'Aubépin par lesdits huguenots et conduit par eux à la Roche il fut gardé 24 heures et pendu par les bras à un travon de ladite maison, jusqu'à ce qu'il eût baillé 21 écus pour sa rançon . »
Vingt ans plus tard en 1590, deuxième épisode. Plusieurs nobles de notre région ayant pris parti pour les protestants, dont Zacharie de Rébé seigneur de Thisy, ce sont les catholiques cette fois-ci qui attaquent.
Nouveau siège avec l'artillerie. Voici des témoignages ; d'abord celui de Mulsant :
« Ceux-ci, avaient installé leur artillerie sur le camp, à Cocogne. Le jeu de ces canons fut terrible, moins sur le fort même que sur les murs d'enceinte et sur les Essarts et deux ou trois autres capitaines, ayant chacun le leur, et sept enseignes d'arquebusiers à cheval, formant un nombre de 1.200 à 1.500 chevaux ; il traversa les montagnes du Morvan, assiégea Thisy et le brûla ».
et celui du curé de Thisy (registres paroissiaux), sur la même feuille du registre :
« Ce jourd'hui XXIIII° jour de juingt 1590 et le jour de Sainct Jean-Baptiste a été assiégé le Châtiaud de Thisi par monsieur de Lapie et Nérestang ( les de Nérestang sont de La Bénissons- Dieu) et a été randu sept semaines après et on tiré douze vingt et treize coupt de canon (253 coups).
» (J.B. Bérerd, 1590).
« En 1592, une compagnie du marquis de St Fortunat qui tenait pour la Ligue, et pour lors estant à St Symphorien, pille un convoi composé de 18 montures chargées de marchandises venant de Lyon et destinées aux marchands de St Just-en-Chevalet. »
Les ligueurs catholiques vont s'en prendre à tous les villages où le marquis de Rébé et seigneur d'Amplepuis et de Thisy possède des biens.
A Amplepuis, les ornements et vases sont déchirés ou abîmés par les soldats d'un certain capitaine Bard ; aux Sauvages, ils détruisent une partie de la chapelle ; à Machézal les linges d'autel et vêtements de culte sont mis à mal.(constats faits par le délégué de l'évêque).
L'adjuration de Henri IV en 1593 met fin aux évènements. Comme quoi, si comme le soulignait Henri IV, « Paris vaut bien une messe », la paix revenue dans nos villages aussi… même si la solution pour y parvenir n’est pas très orthodoxe…